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SOLIDE

Poésie

Y’en a un qui m’a dit : «  Salut !
Te revoir, on n’y comptait plus »

Georges Brassens, Celui qui a mal tourné

Étymologie

Solide < lat. solidus = dense, compact, massif, consistant, solide < rac. i.-e. *sol-w- qui désigne quelque chose de solide, d’entier, de massif.
De son côté, salut < lat. salus = le bon état physique, la santé, la conservation, le salut, l’action de saluer U salvus = intact, entier, bien portant < rac. i.-e. *sol-w-.
Il est possible (Littré) que « sol » et solide, donc aussi salut, appartiennent à la même famille. L’absence de certitude conduit à conserver les deux entrées sol et solide indépendantes.

Domaines

La faune et la flore : consoude, sauge, solidage, solidago (lat.), solipède
L’habitat : console
Le travail manuel : consolidable, consolidation, consolidé, consolider, désolidariser, dessouder, dessoudure, ressouder, solidariser, solidement, solidification, solidifier, solidité, soudabilité, soudable, soudage, souder, soudeur, soudure
Les sentiments : désolidariser, insouciance, insouciant, insoucieux, salvateur, salvatrice, sans-souci, sauvegarde (hyb.), sauvegarder (hyb.), sauve-qui-peut, sauver, sauvetage, sauveteur, sauveur, solennel, solennellement, solennisation, solenniser, solennité, solidaire, solidairement, solidariser, solidarité, sollicitude, souci, soucier, soucieusement, soucieux, soudard, soudoyer
La communication : saluer, salut, salutation, sollicitation, solliciter, solliciteur, sollicitude
La spatialité : Salvador
La spiritualité : salutiste
Le travail intellectuel : sauf
La politique : sauf-conduit
L’économie : consolidé, solde (< it.), solder (< it.), solderie, soldes, soldeur, sou
La justice : sauf-conduit, sauvette
La médecine : insalubre, insalubrité, salubre, salubrité, salutaire
L’armée : demi-solde, salve, soldat (< it.), soldate (< it.), soldatesque (< it.), solde (< it.), soudard
Divers : Salvador, Salvadore, Salvator, Salvatore, Solange, Zélie

Commentaire

Le sens premier (entier, massif) apparaît encore dans des termes comme solide, consolider, la soudure, la solidité, la solidarité, solipède, qui désigne non pas un animal à un seul pied, mais un animal dont le pied est massif, comme le cheval dont le doigt unique de chaque pied se termine par un sabot…
Le mot sou est en fait très proche du sens premier de solide. C’est l’empereur Constantin qui créa une nouvelle monnaie d’or, de 4.55 gr., qu’il appela « solidus aureus », « la pièce d’or massif », qui garantissait un cours stable, ce qui fut le cas pendant plusieurs siècles. Les sous suivants furent moins prisés, puisqu’il fallait, sous les rois de France, vingt sous pour faire une livre, puis un franc (Source : Jean Bouffartigue et Anne-Marie Delrieu, Trésors des racines latines, Belin). Ce terme sou est à la base du mot soudard : le soudard est un militaire payé pour se battre, une sorte de mercenaire. La solde est la paye des mercenaires. La solde est aussi ce que reçoit le soldat, qui n’est pas toujours un mercenaire… Toujours à partir de sou, solder un compte c’est le consolider, l’acquitter, le clôturer. Solder a signifié ensuite « vendre au rabais », d’où les soldes, qui sont et restent au masc. (avec une influence de « salvus » sur « soldus », d’où le lat. méd. « saldus » évoluant en it. en « saldare » repris par le fr. sous la forme solde).
Assez proche du sens premier de solide, « massif », on relève l’idée de « bonne santé », par ex. dans salubre, sauvegarder, salutaire, salvateur, sauf (dans « sain et sauf »), la sauvegarde, sauver, la sauge (étymologiquement « l’herbe qui sauve », « l'herbe bienfaisante »), la consoude (qui affermit, consolide, et était utilisée autrefois pour arrêter les hémorragies), la solidage (appelée aussi le solidago, soit « la plante qui affermit, qui durcit, qui rend solide », dotée, dit-on, de propriétés vulnéraires).
Le salut est le fait d’être sauvé, sauf, en bonne santé, puis un souhait de bonne santé, puis un geste ou un mot de bienvenue dont on a oublié la signification première. La salve est tirée pour saluer un grand événement. La sauvette, quant à elle, a d’abord été une petite hotte en osier (où l’on pouvait sauver des denrées ? ), mais le terme renvoie à un sens secondaire de sauver. Se sauver, c’est rester en vie, en particulier en prenant la fuite. Le vendeur à la sauvette est donc prêt à tout instant à se sauver en courant pour échapper à un contrôle de police et conserver (dans sa sauvette ? ) des marchandises qui peuvent parfois ne pas être assujetties à la TVA ni remboursées par la sécurité sociale…
La console, ici, est en architecture une saillie sur le mur destinée à porter une charge (balcon, corniche… ). Cette console a pu servir d’appui dans les salles de chœur, au point que certains étymologistes rattachent le mot console à la famille de consoler. Le sens de console en ébénisterie désigne une table décorative appliquée contre un mur, à la manière de la console en pierre.
Le verbe soucier, de son côté, signifie étymologiquement « ébranler fortement », à partir de « sou- » qui signifie « en bloc », « entier », d’où « complètement », et de « -cier » formé sur le vb lat. « citare » (cf. l’entrée citer), qui signifie « pousser ». Le verbe solliciter est construit tardivement sur les deux mêmes radicaux, et s’est spécialisé dans le sens d’« intervenir expressément auprès de quelqu’un », « chercher à le convaincre ou à le persuader, l’émouvoir, pour obtenir une faveur ».
Reste la sous-famille de solennel qui signifie d’abord « qui revient tous les ans », avec donc une forte nuance temporelle, « ordinaire », « habituel », puis solennel (au sens moderne), « consacré ». Seul ce dernier sens a survécu.

Complément

Le terme console, au sens de « soubassement de l’orgue » et de « périphérique » (en informatique), appartient à la famille de sol.

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Abréviations et conventions concernant la langue :

abr. abréviation
adj. adjectif
adv. adverbe
a. fr. ancien français
c.-à-d. c’est-à-dire
cf. confer
ex. exemple
fam. familier
fém. féminin
hyb. hybride
id. idem, pareillement
loc. locution
masc. masculin
neut. neutre
part. participe
p.-ê. peut-être
plur. pluriel
pop. populaire
préf. préfixe
prép. préposition
pron. pronom
rac. racine
rad. radical
sing. singulier
subst. substantif
suff. suffixe
vb verbe


Abréviations et conventions concernant le latin :

bas lat. bas latin (à partir du IIIe siècle de notre ère)
lat. latin classique
lat. ecclés. latin ecclésiastique (langue des auteurs chrétiens à partir de la fin de l’Empire)
lat. imp. latin impérial (à partir de la fin du 1er siècle de notre ère)
lat. méd. latin médiéval (à partir du VIIe siècle de notre ère, langue écrite)
lat. pop. latin populaire (à partir du IIIe siècle de notre ère, et dont les formes ne sont pas attestées dans les textes) (1)
lat. vulg. latin vulgaire (à partir du IIIe siècle de notre ère, et dont les formes ne sont pas attestées dans les textes) (1)
grom gallo-roman = latin parlé au Moyen Âge
lat. bot. latin des botanistes


Abréviations et conventions concernant les autres langues :

alld. mot directement emprunté à l’allemand, mais d’origine latine
als. mot directement emprunté à l’alsacien, mais d’origine latine
angl. mot directement emprunté à l’anglais, mais d’origine latine
ara. mot directement emprunté à l’arabe, mais d’origine latine
bre. mot directement emprunté au breton, mais d’origine latine
celt. mot directement emprunté au celtique, mais d’origine latine
esp. mot directement emprunté à l’espagnol, mais d’origine latine
fran. mot directement emprunté au francique, mais d’origine latine
germ. mot directement emprunté au germanique, mais d’origine latine
it. mot directement emprunté à l’italien, mais d’origine latine
occ. mot directement emprunté à l’occitan, mais d’origine latine
piém. mot directement emprunté au piémontais, mais d’origine latine
port. mot directement emprunté au portugais, mais d’origine latine
prov. mot directement emprunté au provençal, mais d’origine latine

< alld. mot emprunté à l’allemand, mais d’origine latine
< als. mot emprunté à l’alsacien, mais d’origine latine
< angl. mot emprunté à l’anglais, mais d’origine latine
< ara. mot emprunté à l’arabe, mais d’origine latine
< bre. mot emprunté au breton, mais d’origine latine
< celt. mot emprunté au celtique, mais d’origine latine
< esp. mot emprunté à l’espagnol, mais d’origine latine
< fran. mot emprunté au francique, mais d’origine latine
< germ. mot emprunté au germanique, mais d’origine latine
< it. mot emprunté à l’italien, mais d’origine latine
< occ. mot emprunté à l’occitan, mais d’origine latine
< piém. mot emprunté au piémontais, mais d’origine latine
< port. mot emprunté au portugais, mais d’origine latine
< prov. mot emprunté au provençal, mais d’origine latine
i.-e. indo-européen
arg. argot
arc. archaïque