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CORNE

Poésie

Il avait nom corne d’Aurochs, au gué, au gué
Tout l’mond’ peut pas s’app’ler Durand, au gué, au gué

Georges Brassens, Corne d’Aurochs

Étymologie

Corne < lat. vulg. corna < lat. cornua (plur. neut. pris pour un fém. sg) < cornu = la corne, tout objet en forme de corne ou dur comme de la corne ou se trouvant au sommet (comme le cerveau et, par extension, la tête tout entière) < rac. i.-e. *ker- / *kor- (avec des suffixes -s- ou -n- ou -w-) (mêmes sens)

Domaines

Les quatre éléments : Capricorne, cornaline, cornéenne
La faune et la flore : bigorneau, Capricorne, capricorne, cerf, cerf-volant, cervidé, cor, cornacée, cornichon, cornier, cornillon, cornouille, cornouiller, décorner, dix-cors, écorner, encorné, encorner, loup-cervier, salicorne, serval (< port.), unicorne
Le corps : cérébral, cérébro-spinal, cerveau, cervelas, cervelet, cervelle, cervical, cornée, cornéen, cornette
L’habitat : coron
Le travail manuel : bicorne, bigorne, biscornu, corné, cornet, cornetier, cornière, cornu, cornue, décérébration, décérébrer, écorner, écornure, racornir, racornissement, tricorne
Les arts : cor, cornemuse, cornemuseur, cornemuseux, corner, cornet, cornettiste, corniste
Les sentiments : bigorner (se), cornard, décervelage, décerveler, écervelé, écornifler, écornifleur
La spiritualité : Capricorne, capricorne, licorne
Le travail intellectuel : cérébral, cérébralité, corniaud, cornichon, corniot
La médecine : cervicalgie (hyb.), cornage, migraine (hyb.)
Les loisirs : cerf-volant

Commentaire

Au sens premier, le mot corne apparaît dans le bicorne, le bigorneau, biscornu, le capricorne, le cor, corne du cerf. On peut ajouter la licorne, où « li- » signifie « un seul », la cornée, abréviation pour « la tunique cornée », calotte sphérique un peu saillante à l’avant du globe oculaire.
D’autres termes incluent le radical de corne pour en rappeler la forme ou l’aspect. C’est le cas de la bigorne, petite enclume d’orfèvre, du tricorne, du cor, quand il s’agit de l’instrument de musique, de la cornacée, famille de plantes dialypétales, telles que le cornouiller, ainsi nommé à cause de la dureté de son bois semblable à celle d’une corne, de la cornaline, pierre fine de la couleur de la cornouille quand celle-ci est mûre, de la cornue, en chimie, du cornichon, du cornier, arbre qui figure le coin d’une coupe en forêt, de la cornière, pièce métallique protégeant les angles dans une construction.
On peut ajouter la cornéenne, roche compacte dont l’aspect est celui de la corne, la cornemuse, le cornet, la cornette, le corniste et le cornettiste, le racornissement, écorner, corner, la salicorne, plante des rivages salés dont on extrayait autrefois la soude.
L’écornifleur est un pique-assiette. On arrive à ce sens à partir du vb écorner qui, à côté de « couper les cornes », signifie « ébrécher », « entamer », « amputer », avec une influence de l’a. fr. « nifler » qui signifiait « renifler », mais aussi « ruiner », « berner », et avec aussi l'influence de « rifler » au sens de « limer », « égaliser », donc « faire disparaître de la matière ».
En picard, le mot coron désigne l’extrémité d’un bâtiment, sa corne, puis, par extension, le bâtiment, puis le quartier ouvrier. Le cornard porte, symboliquement, des cornes : c’est un mari trompé. Mais pourquoi des cornes ? Il existe plusieurs réponses. Le cornard, c’est la créature cornue, donc le diable. Le diable, pour séduire l’épouse, se serait délesté de ses cornes sur le mari. Autre explication : les bêtes à cornes, toutes, sont souvent affublées d’un caractère benêt. Le mari trompé est assez benêt pour ne pas avoir démasqué le mauvais tour que lui joue sa femme… Autre explication encore : dans l’ancien testament, les cornes sont un symbole positif, d’honneur, de gloire, de force, de courage. Moïse est souvent peint avec des cornes qui étaient des rayons de lumière qui parurent sur sa tête en descendant du Sinaï. Ce serait ensuite par dérision que les cornes auraient été attachées à des valeurs négatives, opposées aux premières. Jacqueline Picoche fournit une autre explication encore : « l’origine de ce fait [le lien entre les cornes et le cocuage] est à chercher dans l’habitude qu’on avait prise de signaler les coqs que l’on châtrait en leur coupant les ergots et en les leur implantant dans la crête où ils ressemblaient à de petites cornes ». La difficulté relative à prononcer le terme cornard explique par ailleurs qu’il ait parfois évolué vers conard, ou connard, de sens proche, mais dérivé de con. Pareillement, le corniaud, ou corniot, est un chien mâtiné, conçu au coin (à la corne) de la rue. Le mot corniaud, comme injure, suit la même évolution que cornard : les trois termes corniaud, connard et cornard deviennent quasiment interchangeables… On est tenté d’y ajouter cornichon, même si le terme, au sens premier, renvoie à la petite cucurbitacée en forme de corne. Le cornage est le bruit que fait une respiration difficile où le malade - le terme s’emploie surtout pour les chevaux - semble corner.
À la rac. se rattache aussi le cerf, l’animal à cornes par excellence, donc le loup-cervier, un loup qui s’attaque au cerf, le cerf-volant et le serval, avec un [s] dû à un emprunt au portugais. Le serval s’est appelé jadis le chat-cervier, par analogie avec le loup-cervier. À la rac. de corne est également rattachée l’idée de cerveau, placé sous les cornes… D’où la cervelle, le cervelas, le cervelet, le cervidé, décérébrer (pratiquer une ablation du cerveau) et décerveler (détruire le cerveau, mais au sens métaphorique le plus souvent).
Requiem pour un métier d’autrefois : le cornetier « récupérait les cornes de vache dans les abattoirs, [] les nettoyait pour leur mise en œuvre et [] en faisait le commerce ». (Gérard Boutet, La France en héritage, Perrin, 2007)

Complément

Viennent du grec des mots comme le coryphée, le crâne, le rhinocéros.

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Abréviations et conventions concernant la langue :

abr. abréviation
adj. adjectif
adv. adverbe
a. fr. ancien français
c.-à-d. c’est-à-dire
cf. confer
ex. exemple
fam. familier
fém. féminin
hyb. hybride
id. idem, pareillement
loc. locution
masc. masculin
neut. neutre
part. participe
p.-ê. peut-être
plur. pluriel
pop. populaire
préf. préfixe
prép. préposition
pron. pronom
rac. racine
rad. radical
sing. singulier
subst. substantif
suff. suffixe
vb verbe


Abréviations et conventions concernant le latin :

bas lat. bas latin (à partir du IIIe siècle de notre ère)
lat. latin classique
lat. ecclés. latin ecclésiastique (langue des auteurs chrétiens à partir de la fin de l’Empire)
lat. imp. latin impérial (à partir de la fin du 1er siècle de notre ère)
lat. méd. latin médiéval (à partir du VIIe siècle de notre ère, langue écrite)
lat. pop. latin populaire (à partir du IIIe siècle de notre ère, et dont les formes ne sont pas attestées dans les textes) (1)
lat. vulg. latin vulgaire (à partir du IIIe siècle de notre ère, et dont les formes ne sont pas attestées dans les textes) (1)
grom gallo-roman = latin parlé au Moyen Âge
lat. bot. latin des botanistes


Abréviations et conventions concernant les autres langues :

alld. mot directement emprunté à l’allemand, mais d’origine latine
als. mot directement emprunté à l’alsacien, mais d’origine latine
angl. mot directement emprunté à l’anglais, mais d’origine latine
ara. mot directement emprunté à l’arabe, mais d’origine latine
bre. mot directement emprunté au breton, mais d’origine latine
celt. mot directement emprunté au celtique, mais d’origine latine
esp. mot directement emprunté à l’espagnol, mais d’origine latine
fran. mot directement emprunté au francique, mais d’origine latine
germ. mot directement emprunté au germanique, mais d’origine latine
it. mot directement emprunté à l’italien, mais d’origine latine
occ. mot directement emprunté à l’occitan, mais d’origine latine
piém. mot directement emprunté au piémontais, mais d’origine latine
port. mot directement emprunté au portugais, mais d’origine latine
prov. mot directement emprunté au provençal, mais d’origine latine

< alld. mot emprunté à l’allemand, mais d’origine latine
< als. mot emprunté à l’alsacien, mais d’origine latine
< angl. mot emprunté à l’anglais, mais d’origine latine
< ara. mot emprunté à l’arabe, mais d’origine latine
< bre. mot emprunté au breton, mais d’origine latine
< celt. mot emprunté au celtique, mais d’origine latine
< esp. mot emprunté à l’espagnol, mais d’origine latine
< fran. mot emprunté au francique, mais d’origine latine
< germ. mot emprunté au germanique, mais d’origine latine
< it. mot emprunté à l’italien, mais d’origine latine
< occ. mot emprunté à l’occitan, mais d’origine latine
< piém. mot emprunté au piémontais, mais d’origine latine
< port. mot emprunté au portugais, mais d’origine latine
< prov. mot emprunté au provençal, mais d’origine latine
i.-e. indo-européen
arg. argot
arc. archaïque